Fausses alarmes: un réel problème

Un système se déclenche. Aussitôt, la centrale communique avec la Sûreté du Québec. Gyrophares et sirène en fonction, les policiers s’y rendent en mode «urgence». Résultat? Une fausse alarme. Encore. Les patrouilleurs de la SQ de Brome-Missisquoi se déplacent en moyenne six fois par jour pour des appels reliés à des alarmes non fondées. En Haute-Yamaska, les patrouilleurs sont un peu moins sollicités avec moins de deux appels par jour. Pour renverser la vapeur, les élus municipaux sévissent en donnant plus de mordant à la règlementation en vigueur.

Entre le 1er avril 2012 au 31 mars 2013, 2 195 appels pour des fausses alarmes intrusion ont été pris par les patrouilleurs de Brome-Missisquoi. Cela représente 18,78% des 11 689 déplacements policiers, soit une moyenne de six déplacements par jour. Pourtant, il s’agit du plus bas taux des trois dernières années. En 2011-2012, les alarmes non fondées constituaient 18,88% des appels, tandis que le pourcentage était de 19,87 l’année précédente.

En Haute-Yamaska, les systèmes d’alarme situés sur le territoire couvert par la SQ se sont inutilement déclenchés 676 fois entre le 1er avril 2012 et le 31 mars dernier, alors que 4 238 appels ont été enregistrés. Les fausses alarmes intrusions représentent donc 15,95% des déplacements policiers. Dans cette région, ce type d’appels est en constante évolution. En 2010-2011, 14,71% (665) des cartes d’appels concernaient de fausses alarmes, alors que ce chiffre est passé à 15,63% (667) l’année suivante.

D’après les données disponibles dans le plus récent rapport annuel de la SQ de Brome-Missisquoi, certaines municipalités portent tristement le titre de «championnes» des fausses alarmes. C’est le cas d’Abercorn. L’an dernier, les policiers ont répondu à 72 appels, dont la moitié (36) concernait une alarme non fondée. Bolton-Ouest (37,93%) et Sutton (36,39%) complètent le podium.

Un problème réel

Les directeurs des postes de la SQ de la région s’entendent pour dire que les déplacements pour les alarmes non fondées sont une problématique. «Les cartes d’appel reliées aux systèmes d’alarme occupent beaucoup de temps de nos policiers. Près de 20% des appels sont des fausses alarmes», convient le capitaine Yanik Ferland, directeur du poste de Brome-Missisquoi. Pour l’officier, il s’agit d’un problème réel. «C’est du temps et de l’énergie qu’on ne met pas ailleurs. Ce sont des appels qui nous empêchent de mettre nos énergies sur d’autres problématiques comme la sécurité routière», ajoute-t-il. En Haute-Yamaska, le lieutenant Jocelyn Desrochers, directeur du poste de la SQ, souligne aussi la nature particulière de ce type de déplacements. «Le problème des appels, ce sont les alarmes. Cela représente 16% de tous les appels», dit-il.

Même si la majorité des appels pour les alarmes sont non fondés, les patrouilleurs de la SQ circulent en «mode urgence». «Certains corps de police ne priorisent plus ce type d’appels, mais pour nous, il s’agit encore d’un appel priorité 1 [prioritaire]», indique Yanik Ferland en précisant que les policiers se déplacent avec diligence. «On se déplace souvent à deux véhicules parce que c’est un appel de priorité 1», ajoute le lieutenant Desrochers.

Des changements à venir?

Au cours des dernières années, la MRC de Brome-Missisquoi a revu sa règlementation. «Selon le RM 110, une amende est délivrée après la 2e fausse alarme. Toutes les municipalités de la MRC y ont adhéré, sauf Stanbridge Station, précise le capitaine Ferland. Pour l’instant, il n’y aura pas de changement [pour les amendes] parce qu’on vient de refaire le RM 110.» En poste depuis quelques mois seulement, la directrice générale de Stanbridge Station, Carole Pigeon, ne peut expliquer pourquoi sa municipalité n’a pas entériné ledit règlement. «Je peux vous dire, par contre, que je vais le présenter aux élus à la séance du 5 août. On ne veut pas être à part nous autres!», lance-t-elle.

Pour Arthur Fauteux, préfet de la MRC de Brome-Missisquoi, les fausses alarmes ne sont pas «une problématique simple». «Ça fait déplacer du monde dans des véhicules en mode urgence. Ça les force à circuler rapidement, mais il ne faut rien prendre pour acquis. On ne peut pas dire que c’est une fausse alarme sans le constater», dit-il.

Néanmoins, les élus de la MRC ont entamé une réflexion pour sévir davantage. «On regarde la faisabilité de rendre la règlementation plus contraignante. On travaille là-dessus», ajoute M. Fauteux. Ce dernier ne cache pas que le nouveau règlement pourrait s’orienter vers celui de la Haute-Yamaska. «Il risque d’y avoir des amendes plus fortes», soutient-il. La nouvelle mouture de la règlementation pourrait être adoptée dès 2014. Actuellement, un système d’amendes progressives démarrant à 50$ (plus les frais) est en vigueur dans Brome-Missisquoi.

Un règlement contraignant

En Haute-Yamaska, la MRC a récemment revu son règlement, qui a été adopté par l’ensemble des municipalités, question de lui donner plus de mordant et discipliner les citoyens délinquants. «Le règlement date de 1998. Depuis, on l’a modulé en 2000 et en 2005 en mettant des amendes plus élevées. On donnait deux chances. On a été bon joueur», explique le préfet de la MRC et président du Comité de sécurité publique, Pascal Russell.

Malgré ces modifications, le nombre d’alarmes n’a pas diminué, fait remarquer Jocelyn Desrochers. Sur les 803 déclenchements de systèmes d’alarme en 2012-2013, seuls 127 étaient fondés. «Ça veut dire que les policiers se sont déplacés 676 fois pour rien. C’est énorme!», lance M. Russell.

Après analyse, il en ressort que les fausses alarmes survenaient souvent aux mêmes endroits en Haute-Yamaska. «Ça va peut-être vous fâcher, mais certains citoyens déclenchaient leur système pour voir le temps de réponse des policiers», ajoute M. Russell. Les élus ont donc sévi il y a deux mois. «Dès la première fausse alarme, une contravention de 42$ est émise. Soyons responsables et assurons-nous que notre système est fonctionnel. On ne peut pas dire qu’on n’a pas été tolérant. On veut que nos policiers mettent leurs efforts sur des appels fondés au lieu de systèmes d’alarme défectueux ou de la négligence des citoyens», souligne Pascal Russell. Puisque la nouvelle règlementation est relativement jeune, il est impossible, pour le moment, de voir son effet sur les statistiques.