Pascal Courtemanche: de policier à journaliste en Haïti

Voilà deux mois maintenant que le sergent Pascal Courtemanche, de la Sûreté au Québec, a débuté sa mission d’un an en Haïti. Affecté à Port-au-Prince, le policier, responsable de l’équipe d’enquêtes de Brome-Missisquoi, est… journaliste-éditeur!

Après avoir suivi un processus d’une durée d’un an et demi, puis une formation de près de quatre semaines à Ottawa, le sergent Pascal Courtemanche s’est envolé pour Haïti le 19 août dernier pour porter l’uniforme de la MINUSTAH (Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti).

Même si son déploiement ne date que de deux mois, Pascal Courtemanche a déjà occupé trois fonctions à Port-au-Prince. Dans un premier temps, il a œuvré dans les camps de réfugiés qui ont vu le jour après le séisme de janvier 2010. «Je suis allé travailler au niveau de l’investigation dans les campements temporaires. La police haïtienne avait le mandat d’enquêter sur tous les crimes et moi, je devais regarder si l’enquête avait été bien faite et si les droits des personnes avaient été respectés. Comme il y avait des évictions, on était aussi là pour s’assurer qu’elles se passent bien et que les gens ne se faisaient pas voler», explique Pascal Courtemanche. Il a également été déployé à l’académie de police où il a corrigé les examens de français des 9 000 candidats qui souhaitaient obtenir l’un des 1 000 postes de policiers disponibles. «Ça m’a permis de voir le processus pour devenir policier en Haïti. J’ai bien aimé ça», dit-il.

Récemment, il a été assigné au Press Information Office du Commissariat de police où il travaille à titre de journaliste-éditeur. «On fait ressortir le travail de la MINUSTAH dans la colocation avec les policiers haïtiens. Je dois relever tous les beaux projets entre les deux organisations. Je dois aussi suivre les activités dans tout Haïti du Commissaire en chef ce qui va m’amener à voyager dans le pays, selon les projets», raconte le policier-journaliste.

Il a déjà rédigé son premier article. «C’est un début!, dit-il en riant. J’ai couvert la venue de Stefan Feller (conseiller pour les questions de police des Nations Unies au sein du Département des opérations de maintien de la paix). Il est parti de New York et il est venu évaluer la mission de la MINUSTAH. Il est venu voir l’évolution de la mission pendant trois jours sur le terrain.»

Une paranoïa contrôlée

À son arrivée à Port-au-Prince, Pascal Courtemanche a découvert une autre réalité, celle de l’insécurité. «Après être atterri à l’aéroport, on a été escorté dans un autobus avec des grillages, avec deux soldats armés et ils nous ont amené à notre hôtel qui était entouré de barbelés et de murs. Ma première image, c’est le choc de la sécurité», confie-t-il.

Après deux mois, cet aspect fait maintenant partie de la routine. «Je me suis aperçu, quand je suis revenu (au Québec), que le sentiment d’insécurité qu’on peut ressentir ici au Québec est pas mal exagéré comparé à ce qu’on vit là-bas», dit-il en faisant allusion à nos terrains ouverts et à l’absence de gardien. Mais il s’attendait à cette réalité. «Il faut toujours garder une paranoïa contrôlée, c’est notre attitude. On est préparé comme ça. Il n’y a pas une journée où on peut se dire que c’est rendu sécuritaire. Il faut toujours penser que c’est peut-être aujourd’hui qu’il va arriver quelque chose parce qu’il y a encore trop de possibilités que ça arrive. La paranoïa contrôlée, c’est ça.»

Outre la sécurité, Pascal Courtemanche doit aussi vivre avec une barrière langagière. «Une des choses fatigantes, c’est le blocage du langage. On travaille avec un collègue, qui fait le même travail que nous, qui parle juste en anglais, en espagnol, en créole. Chaque personne que tu abordes, tu te questionnes à savoir dans quelle langue que tu le fais. Le plus difficile, c’est d’adapter notre langue aux personnes qu’on côtoie. C’est une adaptation quotidienne.»

En plus de côtoyer les membres des forces policières internationales, le sergent Courtemanche a la chance de fréquenter les Haïtiens qui sont très débrouillards avec le peu qu’ils ont. «J’adore le contact avec eux. Ils n’ont pas le même background que nous. Ce sont des gens très croyants et ils sont ouverts à tout le monde, mais ils ont gardé leur petite culture à eux.»

Il a aussi profité de sa présence pour s’impliquer auprès des orphelinats. «C’est super enrichissant. C’est notre petite paie comme missionnaire, on a affaire à de jeunes Haïtiens qui n’ont rien et qui ont la naïveté de la vie. Ils apprécient que tu viennes juste les voir, que tu fasses une activité avec eux.»

Après un court séjour au Québec, Pascal Courtemanche s’est envolé à nouveau pour Haïti, lundi. Il sera de retour en décembre pour célébrer le temps des fêtes avec ses proches.