Une auteure de la région lève le voile sur un pan obscur de l’histoire canadienne

LITTÉRATURE. Dans son nouveau roman Trahisons, le premier tome de La Brochure, l’auteure frelighsbourgeoise Pauline Gélinas révèle au grand jour ce que plusieurs familles ukrainiennes ont dû traverser à leur arrivée au Canada au début du 20e siècle. Ouvrage de fiction, Trahisons est le fruit d’une recherche étoffée sur des atrocités qu’ont vécu ses familles.

«Ce qu’est La Brochure, c’est une saga politico-historique sur une des pages les plus tragiques et méconnues de la construction du Canada et à travers ça, l’histoire d’une famille ukrainienne sur six générations de 1902 à 2014, décrit l’auteure. Ce que ça raconte, c’est le périple infernal qu’ont dû affronter les Pylypow qui ont été quatre fois trahis par le gouvernement canadien et les contrecoups de ses manœuvres scandaleuses là, 100 ans plus tard, pour leurs descendants.»

Ces trahisons-là sont bien réelles, affirme Mme Gélinas. À coup de brochures, d’où le nom de la série, le Canada se rendait en Europe, entre autres, en Ukraine, pour attirer des travailleurs en leur faisant miroiter une vie meilleure à titre d’agriculteurs dans les prairies.

«Le gouvernement savait très bien, à ce moment-là, que ces gens-là feraient face à la famine, soutient l’auteure qui a été reporter et chef d’antenne à la radio de Radio-Canada et rédactrice en chef pour le Journal du Barreau. Plus encore, ils les ont attirés ici sous de fausses promesses, mais après ça, ça a été la prison, l’esclavage et la dépossession totale. La Brochure, c’est l’histoire de ces trahisons-là à travers des magouilles qu’on découvre, de la corruption, mais surtout, une histoire de courage et d’une amitié qui va survivre à toutes épreuves.»

Recherches
La page couverture de Trahisons, le premier de deux tomes de La brochure. (Photo: Le Guide – Xavier Demers)

Tout a commencé quand Pauline Gélinas travaillait pour une maison d’édition. Elle a découvert dans un manuel scolaire destiné au franco-ontarien une petite information qui l’a mené à pousser ses recherches.

«J’ai découvert un tout petit paragraphe qui me révélait une grosse affaire dont je n’avais jamais entendu parler. J’ai appris qui était le responsable de la transformation économique, qui a fait en sorte que le Canada est devenu si riche, est devenu un grenier à blé. J’ai commencé à faire des recherches. Ce gars-là, on n’en a jamais entendu parler dans nos manuels scolaires. Je suis parti d’une entrevue faite avec quelqu’un au ministère fédéral de l’Agriculture qui m’apprend que ce Canadien anglais qui a changé la face économique du Canada était avant tout un musicien et francophile, plus que Jim Corcoran, si ça se peut!»

C’est au fil de ses recherches qu’elle a trouvé l’existence de camps de concentration au Canada où ont été enfermés des immigrants d’origine austro-hongroise lors de la Première Guerre mondiale.

«Il y a eu 23 camps, dont quelques-uns au Québec, dont un en Abitibi, relate-t-elle. Quand ils sont arrivés là en janvier 1915, il n’y avait rien sauf en lac. Ils ont dû dormir sous la tente pendant les mois de ce premier hiver-là. Ces gens-là ont dû construire, de leurs mains, ces camps de concentration, notamment, l’hôpital qui allait servir à leur amputer des doigts, des orteils, en raison d’engelures.»

À travers son roman, Mme Gélinas fait interagir ses personnages avec de véritables figures historiques. Un index est disponible sur son site internet pour trouver qui a vraiment existé.

Le deuxième tome est prévu pour le printemps prochain.