La santé mentale des Estriens de 12-25 ans toujours fragile, révèle une enquête

JEUNESSE. Si la santé mentale des jeunes semble s’être quelque peu améliorée au cours de la dernière année, elle demeure toujours moins bonne qu’avant la pandémie, révèle une enquête réalisée du 17 au 26 janvier en Estrie, en Montérégie, dans les Laurentides et en Mauricie-Centre-du-Québec au moyen d’un sondage en ligne.

L’étude a été menée auprès de 17 708 répondants âgés de 12 à 25 ans, provenant de 64 écoles secondaires, centres de formation professionnelle, de formation générale aux adultes, cégeps et universités.

Il convient de noter que 57 % des répondants du secondaire proviennent d’une école privée, alors que ce type d’établissement n’est fréquenté que par 15 à 20 % des jeunes.

Objectifs de l’étude

Les résultats de l’enquête ont été dévoilés, hier dans le cadre d’une visioconférence, par la Dre Mélissa Généreux, médecin-conseil à la Direction de la santé publique du CIUSSS de l’Estrie – CHUS et professeure à la Faculté de médecine de l’Université de Sherbrooke.

«L’étude avait pour but d’identifier certains enjeux vécus par les 12-25 ans, de présenter des pratiques identifiées par les jeunes comme favorisant le bien-être et de discuter des pistes de solution pouvant permettre de soutenir les jeunes présentant des signes importants d’anxiété ou de dépression», signale Dre Généreux.

Faits saillants

L’enquête nous apprend notamment que 37 % des jeunes du secondaire et 52 % des étudiants du cégep ou de l’université rapportent des symptômes modérés à sévères d’anxiété ou de dépression. Le phénomène est davantage marqué chez les filles que chez les garçons (52 % vs 21 % au secondaire / 56 % vs 39 % au cegep ou à l’université).

Le quart des jeunes répondants, peu importe leur niveau de scolarité, admettent avoir eu des idées noires au cours des deux dernières semaines. Certains disent avoir pensé qu’ils seraient mieux morts ou avoir pensé à se faire du mal. Les idées noires sont plus fréquentes chez les filles du secondaire (33 %) que chez les garçons du même niveau (14 %).

«Au secondaire, les idées noires et les symptômes anxieux ou dépressifs sont davantage présents chez les étudiants du secteur public que chez leurs homologues du secteur privé. L’étude nous apprend également qu’il existe un lien étroit entre l’anxiété et le contexte familial», indique Dre Généreux.

Facteurs aggravants

L’étude révèle par ailleurs de grands écarts entre les écoles publiques et privées de niveau secondaire au niveau des habitudes de consommation d’alcool, de cannabis, du vapotage et du vapotage de cannabis (waxpen).

Les jeunes qui consomment l’une de ces substances sont davantage enclins  à rapporter des symptômes d’anxiété ou de dépression que ceux qui n’en prennent pas. Au niveau du vapotage, l’écart est de deux pour un (59 % vs 34 %).

Les symptômes anxieux ou dépressifs sont davantage présents chez les étudiants qui passent plus de quatre heures par jour devant un écran (films, émissions, jeux vidéo) ou sur les réseaux sociaux en dehors des heures de classe que chez ceux qui utilisent ces médias de façon plus modérée. Chez les filles du secondaire, on note un écart est de 1,5 entre les deux catégories (70 % vs 41 % pour les réseaux sociaux / 77 % vs 52 % pour les jeux vidéos / 70 % vs 46 % pour les films et émissions). Cette activité entraîne des impact négatifs au niveau du sommeil, de la perception de l’apparence, de la réussite éducative et de l’environnement familial.

Autres considérations

L’enquête établit également un lien entre l’attrait pour l’école et la santé mentale.

Les jeunes du secondaire qui apprécient l’école présentent moins de symptômes d’anxiété ou de dépression que ceux qui ont un intérêt plus limité pour les études (59 % vs 31 %).

Les jeunes sont de plus en plus nombreux à travailler sur une base à temps partiel pendant leurs études. Le phénomène s’accentue au fur et à mesure que les étudiants de secondaire avancent en âge (54 % en secondaire 1 vs 71 % en secondaire 5). Plusieurs répondants admettent travailler plus de 15 heures par semaine. Si les jeunes travailleurs ne sont guère plus anxieux que ceux qui ne travaillent pas durant leurs études, ils sont toutefois nombreux à mentionner qu’ils ont moins d’énergie après le travail, qu’ils sont plus fatigués en classe et qu’ils ont moins de temps pour les loisirs, les activités sociales et les activités physiques.

Pistes de solution

À la lueur de ces observations, les auteurs de l’étude invitent notamment les milieux scolaires et communautaires à créer des environnements favorisant le bien-être. Ils insistent également sur l’importance de cultiver la bienveillance, de renforcer le lien de confiance entre les jeunes et les adultes et de mettre en œuvre, par exemple, des actions en prévention des troubles mentaux.

On croit par ailleurs que les familles auraient avantage à s’impliquer davantage en dialoguant avec les jeunes au sujet de la conciliation études-travail, la consommation de substances ou le temps passé devant l’écran ou sur les réseaux sociaux.

«Est-il normal pour un jeune d’accorder beaucoup de temps aux écrans ou au travail et moins de temps à ses amis?», se demande Dre Généreux.