Mort d’un parachutiste: Nouvel Air blanchie

L’enquête publique du coroner sur la mort du parachutiste-caméraman, Philippe Huard, a permis de blanchir l’école de parachutisme Nouvel Air de Farnham qui était pointée du doigt dans les rapports de la CSST et du coroner Jacques Robinson. La mort de Philippe Huard serait due à une erreur humaine.

 

Les deux rapports publiés à quelques mois d’intervalle en 2011 démontraient que la détermination de la passe de largage, c’est-à-dire le moment où les parachutistes sautent de l’avion, était déficiente, que le terrain présentait des zones de turbulence et que l’utilisation d’une mauvaise voile auraient mené à la mort du parachutiste-caméraman de 34 ans.

 

L’enquête publique du coroner qui s’est déroulée sur deux jours au palais de justice de Saint-Hyacinthe a toutefois permis de rejeter du revers de la main ces conclusions.

 

«Les conclusions sont très claires. Il n’y a jamais eu de problèmes avec la passe de largage. Les intempéries et les zones de turbulence n’ont aucunement influencé les événements et il utilisait un bon équipement», dit le procureur aux enquêtes du coroner, Christian Hacquin.

 

Le 10 octobre 2010, les vents soufflaient à 20-22 km/h et Philippe Huard en était à son deuxième saut du jour lorsqu’il s’est tué. «Il y a eu quatre envolées cette journée-là et tous les gens sont arrivés à bon port. La seule personne qui a passé par-dessus et qui était en position pour venir se poser, c’est Philippe Huard. On ne sait pas pourquoi, il a continué tout droit et a fait son virage trop près du sol», poursuit M. Hacquin.

 

À ce moment, un témoin a vu Philippe Huard, qui comptait un peu plus de 800 sauts à son actif, en position d’atterrissage. «Le témoin ne l’a cependant pas vu plier les genoux et tirer sur ses cordes. Dans le milieu, ça ressemble beaucoup à un virage qui a été fait trop près du sol», poursuit le procureur Hacquin. Le parachutiste a frappé une première fois le sol avant d’être projeté environ huit pieds plus loin. Il s’est infligé de multiples fractures au bas du corps qui se sont avérées mortelles.

 

«On n’aura jamais la vraie réponse, mais c’est clair que le virage était trop bas, mais pourquoi a-t-il continué? Il n’y avait pas de turbulence, pas de problème de voilure, tout était beau. Des fois l’attention des parachutistes est portée sur quelque chose. Il suffit de deux secondes et en parachute, c’est énorme», dit le procureur.

 

À titre de caméraman, Philippe Huard avait amplement le temps d’aller se poser au sol pour ensuite filmer l’atterrissage du tandem. «Le caméraman-parachutiste dispose entre deux et trois minutes entre son atterrissage et la captation. Il a le temps d’enlever son casque, des fois de plier un peu son parachute avant d’aller filmer», résume Christian Hacquin. Philippe Huard n’aurait donc pas eu à se dépêcher pour capter l’atterrissage du client.

 

Grippé? Enrhumé?
L’analyse du sang de ce dernier a démontré qu’il avait consommé des médicaments contre des allergies, la toux et le rhume. «On sait qu’il était congestionné des sinus, mais à quel point? Le pilote de l’avion, Jean Tardif, nous a dit que le matin, Philippe est allé le voir. Il cherchait des décongestionnants. On sait qu’il en a pris, mais on ne sait pas quand exactement. Notre expert René Blais a expliqué que ça peut poser des problèmes au niveau des tympans et des problèmes de vertiges. Il y a des techniques de mâchoires, mais ça peut entraîner des étourdissements. Si quelqu’un est étourdi, c’est difficile de juger dans la descente à quelle hauteur il se situe», enchaîne le procureur qui compte plus de 40 enquêtes publiques à son actif.

 

Nouvel Air blanchie
Aux yeux du procureur, l’école de parachutisme Nouvel Air est blanchie. «L’école n’a rien à se reprocher. C’est une école d’experts. Ce sont tous des gens expérimentés qui travaillent dans la sécurité. Le problème, c’est que ces gens-là n’ont pas été consultés au départ», dit Christian Hacquin.

 

Une opinion que partage l’un des propriétaires de Nouvel Air, Michel Lemay. «Les pendules ont été remises à l’heure. Originalement, les conclusions de la CSST n’auraient jamais dû être là. Ils ne se sont pas associés à des gens qui connaissaient ça. Ils ont sorti des causes farfelues. Aucun parachutiste n’accordait de la crédibilité au rapport», indique-t-il. Ce dernier confit qu’il est bien satisfait du travail du procureur.

 

Malheureusement, son entreprise a souffert de la mauvaise presse à la suite des conclusions de la CSST. «Le mal a été fait. Ce n’est pas plus le fun de le lire là parce que ça ramène le souvenir. J’aurais aimé ne pas avoir eu à me battre. J’aurais espéré que ça soit fait correctement la première fois. Ça nous a coûté de la business. Quand une instance comme la CSST en arrive à ces conclusions, ça sème le doute dans l’esprit des gens.»

 

Le coroner Luc Malouin devrait publier son rapport au mois de juin.