Politique municipale: à quand la parité homme-femme en Montérégie?

Les femmes ont parcouru beaucoup de chemin depuis l’obtention du droit de vote  au Québec en 1940. Si est vrai qu’elles sont de plus en plus présentes sur la scène politique municipale, le fossé entre les élus des deux sexes demeure encore très important comme en font foi les statistiques.

Seize pour cent des municipalités du Québec sont dirigées par une mairesse alors que les femmes occupent 29% des sièges de conseiller.

La MRC de Brome-Missisquoi compte 21 municipalités, mais seulement trois mairesses. Aucune des huit municipalités de la MRC de la Haute-Yamaska n’est dirigée par une femme et une seule des huit municipalités de la MRC de Rouville fait appel aux services d’une mairesse.

«On constate en revanche que plusieurs municipalités de notre région comptent autant ou presque autant de femmes que d’hommes au conseil. Trois des six conseillers de Waterloo, Warden, Saint-Joachim et Saint-Alphonse-de-Granby sont des femmes», signale Éliette Jenneau, conseillère municipale, candidate à la mairie de Granby  et membre du conseil d’administration du Regroupement des élues municipales de la Montérégie-Est (RÉMME).

Les femmes et l’Histoire

Beaucoup d’observateurs s’entendent pour dire que l’absence des femmes en politique municipale s’explique par des facteurs historiques.

«Même si leurs conjoints donnent un coup de main, beaucoup de femmes ont encore le mandat d’aller chercher les enfants à la garderie, de préparer le souper et de s’occuper des devoirs. Il leur reste très peu de temps pour assister à des réunions à l’extérieur du foyer en soirée», indique Sylvie Raymond, conseillère à East Farnham pendant 16 ans et mairesse depuis quatre ans.

Pauline Quinlan, mairesse de Bromont, membre du conseil d’administration de la Fédération canadienne des municipalités depuis dix ans et actuelle présidente du caucus du Québec à la FCM, abonde dans le même sens…

«Il n’y a pas encore si longtemps, les convenances voulaient que la femme s’occupe du bien-être de la famille. Les dames qui, comme moi, élevaient des enfants tout en faisant carrière étaient plutôt rares. Et, celles qui s’engageaient en politique n’étaient pas très bien vues, car ce champ d’activité était d’abord et avant tout une affaire d’homme.», explique l’ancienne directrice de l’école de Sutton qui a dirige les destinées de la Ville de Bromont depuis 1998.

Résultats encourageants

Les statistiques sont toutefois encourageantes et démontrent que les femmes gagnent du terrain petit à petit. Au Québec, le nombre d’élues municipales est passé de 1 999 en 2005 (25 %) à 2 203 en 2009 (27,5 %). Et le nombre de candidatures féminines augmente dans les mêmes proportions.

«À Granby, deux candidates lorgnent la mairie alors que cinq ou six autres convoitent l’un des dix postes de conseiller. C’est du jamais vu!», affirme Éliette Jenneau.

La mairesse de Notre-Dame-de-Stanbridge, Ginette Simard-Gendreault, constate elle aussi une plus grande ’implication des femmes en politique.

«Les femmes prennent leur place, participent, mettent la main à la pâte. Le partage accru des tâches dans le couple libère les femmes et leur permet d’être plus actives à l’extérieur de la maison», résume celle qui a créé un précédent voilà quatre ans en devenant la toute première à occuper le siège de maire dans ce village de 693 habitants.

Lorsqu’on lui demande à quand la parité homme-femme dans les administrations municipales, Pauline Quinlan laisse entendre que les Québécois ne verront pas cela avant plusieurs dizaines d’années.

Ginette S. Gendreault croit pour sa part que «la tarte va finir par se partager également entre les élus des deux sexes. «Tranquillement, pas vite. Après tout, Paris ne s’est pas construite en une seule journée.»

La conseillère Jenneau est beaucoup plus optimiste et estime que l’augmentation du nombre de femmes dans les universités québécoises contribuera à accélérer le rattrapage.

«Avec la hausse du nombre de diplômées, l’obtention de la parité n’est plus qu’une question de temps. Mais, à mes yeux, une surreprésentation des femmes en politique n’apporterait rien de plus. Un ratio moitié-moitié me satisferait pleinement», affirme Mme Jenneau, qui complète actuellement une maîtrise à l’École nationale d’administration publique (ÉNAP).

Au dire de cette dernière, les initiatives du RÉMME et de l’UMQ pour favoriser l’implication des femmes en politique sont nombreuses et commencent à porter fruit.

«Il est encourageant de constater que 32 % des candidates aux élections municipales ont moins de 45 ans. Le pourcentage de jeunes est beaucoup plus bas chez les hommes», précise la candidate à la mairie de Granby.

Recherche du consensus

Tout permet de croire qu’une présence plus soutenue des femmes dans le monde municipal aura des répercussions sur les façons de penser et d’agir.

«Il est essentiel que les femmes s’engagent davantage sur la scène politique. Elles sont très compétentes, très capables et leurs perceptions diffèrent souvent de celles des hommes (…). Leur expérience de mère et de maîtresse de  maison les conduit tout naturellement à porter attention aux détails, à se préoccuper de la justice et de l’équité», insiste la mairesse de Bromont.

Son homologue de Notre-Dame-de-Stanbridge laisse entendre que la façon de faire des femmes et celle des hommes sont différentes. Selon elle, les femmes  ont horreur des confrontations et fonctionnent davantage par consensus.

La mairesse d’East Farnham fait par ailleurs remarquer que les femmes sont plus sensibles et n’ont pas peur de laisser parler leurs émotions. Selon elle, l’émotion a plus que jamais sa place dans l’administration publique.

«Les électeurs, dit-elle, réalisent de plus en plus l’importance d’avoir une bonne représentation féminine. Ils sont de plus en plus ouverts et constatent qu’on est capable de réfléchir et de prendre des décisions.»

La conseillère Éliette Jenneau ajoute que les hommes se préoccupent du réseau routier et du parc industriel alors que les femmes pensent davantage à la qualité de vie et à la dimension communautaire.