Une mère et un fils se retrouvent après 60 ans

RETROUVAILLES. Digne d’un film hollywoodien, une résidente de Cowansville, Micheline Blais, a revu pour la première fois en près de 60 ans son fils biologique, Mark Leonard né au Connecticut. Après le choc d’avoir été séparée de son fils, une enquête qui a laissé supposer sa mort et une lutte contre le cancer, le destin semble les avoir réunis de nouveau.

« Mon père a été marié trois fois, donc je n’ai jamais vraiment eu de figure maternelle dans ma vie, déclare M. Leonard. Maintenant, j’ai 60 ans. Après 59 ans, nous nous sommes retrouvés. »

« Je n’aurais jamais cru le revoir vivant. Jamais. »

– Micheline Blais

Micheline Blais habitait à New Britain, au Connecticut, lorsqu’elle tombe enceinte. N’étant pas marié avec le père, puis séparé depuis peu, elle donne naissance dans une maison pour mères célibataires, qui les forçaient par la suite à les donner en adoption.

« Quand je l’ai eu, je l’ai amené avec moi dans mon appartement, relate-t-elle. Il est resté huit mois avec moi. J’avais des proches qui disaient que j’étais la honte de la famille. Ils ont appelé quelqu’un pour venir le chercher. Ça a vraiment fait mal. »

Mme Blais est restée quelques années aux États-Unis avant de revenir au Québec. Elle a refait sa vie et eu d’autres enfants.

Dans les années 90, son mari et elle ont décidé d’entamer des démarches pour le retrouver.

« Un enquêteur nous a dit qu’il était mort. Quand j’ai su qu’il était mort, ça m’a jeté à terre, encore une fois. Quand ils sont venus le chercher quand il était bébé, ça avait pris du temps m’en remettre et, là, on vient me dire qu’il est mort. J’ai fait deux deuils. »

DÉMARCHES DU FILS

Mark Leonard a appris vers l’âge de 10 ans qu’il était adopté.

À la suite de l’entrée en vigueur d’une nouvelle loi au Connecticut l’an dernier, il a eu accès à son certificat de naissance original, qui note le nom de sa mère.

« J’ai écrit à toutes les Micheline Blais des États-Unis et quelques-unes au Canada aussi, indique-t-il. J’ai reçu des réponses, mais seulement pour me dire que ce n’était pas elles. »

Un de ses amis, Meade Roberts, lance donc des recherches pour retrouver la bonne Micheline Blais.

Après quelques essais infructueux, une recherche permet de tomber sur un avis de décès, celui de ce qui s’avérera être sa sœur biologique, Denise, décédée d’un cancer en 2012.

« La première fois que je suis venu ici, j’ai apporté des photos de moi plus jeune, au secondaire et à l’université, relate-t-il. On a comparé avec elle, c’était une copie conforme. L’apparence, le sourire, c’était pareil ! »

C’est alors que des contacts sont entrepris entre M. Leonard et des proches de Mme Blais.

« En mars 2022, ma fille Christine et mon gendre sont venus me voir ici, se rappelle Mme Blais. Ils étaient excités tous les deux, ils pleuraient. Je me demandais ce qui se passait. Ma fille m’a dit qu’elle avait un frère. Je lui ai répondu que c’était impossible, il est mort. Elle m’a dit non. Je ne voulais pas le croire sur le coup. »

Toutes les bribes d’information que chacun d’entre eux a concordent. Un test d’ADN viendra par la suite confirmer qu’il s’agit bel et bien de sa mère.

PREMIÈRE RENCONTRE

Micheline Blais et Mark Leonard, qui réside toujours au Connecticut, se sont rencontrés pour la première fois, en personne, cet été.

« La première fois que je l’ai vue, je suis arrivée avec ma sœur, Christine, relate M. Leonard. On a cogné à la porte et je lui ai dit :  »Maman, on y est arrivé ». Être adopté, ce n’est pas facile. »

Les deux ont parlé ensemble pendant des heures.

« Mon père adoptif, il a prié pour ce moment pendant plusieurs années, ajoute-t-il. Ses prières ont été entendues. Je pense que ça vient d’en haut, pas le choix. La plupart des gens, après 60 ans, sont décédés ou malades. »

L’un des plus grands regrets de Mark Leonard est qu’il n’a pas pu rencontrer sa sœur biologique.

« J’ai apporté de ses cendres avec moi, raconte-t-il. Elle disait qu’elle voulait voir le monde. J’habite tout près de l’océan, je marche sur la plage tous les soirs. Un jour, j’ai déposé ses cendres dans les vagues et elle a pu faire le tour du monde. »