Accident tragique à Lac-Brome: chronique d’une catastrophe annoncée
Un accident terrible a coûté la vie à deux jeunes filles et en a laissé une autre dans un état grave sur le chemin Bondville, à Lac-Brome, la semaine dernière. Selon les résidents du secteur, ce n’était qu’une question de temps avant que ne survienne pareille tragédie sur cette route utilisée par certains comme une véritable piste de course.
Le chemin Bondville, prolongation de la route 215, longe le lac Brome. La route asphaltée est sinueuse et parsemée de dénivellations, plus ou moins abruptes. La vitesse maximale est établie à 50km/heure sur certains tronçons et à 80 km/h sur d’autres. De nombreuses résidences la bordent, certaines situées à grande proximité de la voie pavée.
Or, selon les résidents, les excès de vitesse sont devenus au fil du temps, un problème récurrent dans les environs.
Alain Archambault habite à quelques kilomètres des lieux où l’accident de la route s’est produit. Sa résidence est située non loin du chemin Bondville, dont la vitesse est fixée à 50km/h dans cette zone.
«Ce n’est pas rare que ça passe à 100, 110 et même 120 ici», affirme le résident. Selon lui, deux problématiques majeures existent dans le secteur. D’une part, des poids lourds qui arrivent par la 215 et accélèrent pour monter une colline. «Les camions clanchent quand ils montent la côte et ensuite quand ils redescendent, ils vont à toute vitesse. Le problème, c’est que ça ne s’arrête pas sur un dix cennes, ces engins-là», explique M. Archambault. D’autre part, depuis l’été dernier, des individus se serviraient du chemin comme d’une piste de course. «Venez ici le soir, c’est un vrai manège, comme à la ronde. Il y a des courses, des crissements de pneu et de la vitesse excessive», poursuit l’homme. Préoccupé par la situation, le citoyen a averti la Sûreté du Québec et la Ville de Lac-Brome, il y a quelques semaines déjà, de ces infractions répétées au Code de la sécurité routière. «À la Sûreté du Québec, on m’a dit, on sait qu’il y a un problème, on a arrêté quelqu’un dernièrement. Après, ils sont venus faire du radar. Par contre, les policiers se stationnent souvent à des endroits où ils sont facilement repérables», relate-t-il. Quant à la Ville de Lac-Brome, son intervention aurait été reçue dans une certaine indifférence et aucune action n’aurait été prise à sa connaissance par la ville à ce sujet.
M. Archambault refuse de croire qu’il n’y a rien à faire pour inciter les individus problématiques à réduire leur vitesse. De la sensibilisation, plus de panneaux indiquant clairement les limites de vitesse, une présence policière accrue à des endroits stratégiques, sont au nombre des solutions qu’il propose.
Namiranian Hushang, domicilié à une centaine de mètres du récent accident automobile, confirme les dires de M. Archambault. «Depuis cet été, on n’ose plus marcher sur le chemin, c’est trop dangereux. On prend la voiture et on va marcher ailleurs», se désole-t-il.
Réjean Laliberté et Colette Gauvin, deux retraités, habitent à un jet de pierre de l’endroit où le véhicule fou a terminé sa course, la semaine dernière. Assis dans sa chaise berçante, devant une grande fenêtre qui donne directement sur la route, M. Laliberté a vu la voiture qui arrivait à toute allure, juste avant l’accident.
«J’étais assis devant ma fenêtre. Je l’ai vue passer et je savais que l’auto ne prendrait pas la courbe. J’ai appelé 911 immédiatement», raconte-t-il. Sa femme et lui confirment eux aussi le problème de vitesse excessive récurrent. «De 16h à 18h, le soir, ça descend à toute vitesse ici», conclut-il.
Reine Boisvert, copropriétaire du camping des Érables, également situé sur le chemin Bondville, montre du doigt une petite croix blanche, à l’extérieur de son commerce. «En juillet 2006, une autre fille est décédée dans un accident ici», se souvient-elle. Selon cette dernière, les policiers viennent régulièrement patrouiller et «c’est incroyable le nombre de gens qu’ils arrêtent chaque fois». La commerçante pense qu’un des problèmes liés au chemin Bondville trouve sa source dans la variation des limites de vitesse. «Les gens qui ne connaissent pas bien le secteur entrent dans le dépanneur et nous demandent si la limite est à 50 ou à 80».
Point de vue de la SQ
Du côté de la Sûreté du Québec, on explique qu’aucune statistique sur les excès de vitesse n’est disponible sur le chemin Bondville.
«Par contre, quand les citoyens nous appellent pour nous informer d’une problématique, nous pouvons venir patrouiller», indique Aurélie Guidon, porte-parole de la Sûreté du Québec de l’Estrie.
De son côté, le maire de Lac-Brome, Gilles Decelles, reconnaît qu’il y a un problème important. À la suite de la requête d’Alain Archambault, le comité de sécurité de la ville se pencherait sur la question de la vitesse. Le maire Decelles explique qu’une des options étudiées serait d’abaisser la limite à 50km/h partout sur le chemin Bondville.
Même si on baisse les limites, ça ne veut pas dire que les gens vont arrêter de les dépasser. Après, il faut de la surveillance policière. Malheureusement, dans ce domaine, la ville ne peut pas faire grand-chose», conclut-il.