Évictions au camping Tropicana de Granby
Quarante-huit résidents permanents du camping Tropicana, rue Principale à Granby, devront déménager leur maison mobile au plus tard le 1er septembre 2012. Dans une lettre signée par le service de l’urbanisme et dont l’Express a obtenu copie, la Ville de Granby tolérera la présence des habitations, sous certaines conditions, pour les six prochains mois. Pas plus.
Le spectre de l’éviction planait sur les résidents depuis l’été dernier, révélait en primeur le site Web du journal l’Express, Granby.enregion.ca, le 11 août dernier. Les pancartes à vendre avaient poussé et plusieurs résidents de l’endroit avaient alors fait une sortie publique dans nos pages pour protester. Leur tentative de faire changer les choses a toutefois été vaine.
Vendredi dernier, les 48 résidents ont reçu une lettre du service de l’urbanisme de Granby. «Nous désirons vous informer que l’occupation annuelle d’un bâtiment situé sur les lots [X] du camping Tropicana n’est pas permise par notre réglementation. […] Toute construction dérogatoire devra être régularisée, soit par sa démolition ou son enlèvement, d’ici le 1er septembre 2012», écrit l’inspecteur en bâtiment de la Ville de Granby.
«Ayant déjà entamé la saison hivernale 2011-2012, nous tolérerons, sous certaines conditions, l’occupation de votre bâtiment. La tolérance dont fait preuve la Ville n’est toutefois pas constitutive de droit et ne sera plus tolérée subséquemment», révèle le document.
D’ici leur départ, les citoyens doivent s’assurer que leur bâtiment est muni d’un avertisseur de fumée fonctionnel, que le bois de chauffage soit entreposé à plus de trois mètres du bâtiment, qu’une adresse identifie clairement la résidence et que les issues soient dégagées.
Réactions
En recevant la lettre de la Ville, une résidente, qui désire conserver l’anonymat, dit s’être mise à pleurer. «Je ne m’attendais pas à cette lettre-là», lance-t-elle.
Si cette dernière n’a pas d’hypothèque sur la résidence qu’elle a achetée en 2009, elle s’inquiète quand même. «Depuis vendredi, je ne dors plus. Je suis rendue aux antirépresseurs», dit-elle. Outre la rareté des terrains à louer, le prix des terrains à vendre et les frais de transport de la maison la stressent.
Et pas question qu’elle déménage à Granby. Elle et d’autres résidents évaluent leur possibilité de recours à la Régie du logement. «Si je fais un recours, ce sera un recours collectif pour que ça coûte moins cher», explique-t-elle.
Une autre résidente, qui souhaite aussi garder l’anonymat par peur de représailles, avoue vivre la situation difficilement. «Je ne dors pas bien. Ce sont nos maisons et on vit sur le seuil de la pauvreté», dit celle qui a une hypothèque à payer. Elle a contacté son institution financière et attend de l’information. Elle n’exclut pas un recours juridique.
«Ça n’a pas d’allure», lance, pour sa part, Robert Goyette, lorsque joint par téléphone lundi avant-midi. «J’ai vendu juste à temps le 30 septembre dernier. J’ai bien fait», dit-il. L’homme est l’un de ceux qui a protesté ouvertement contre le spectre de l’éviction et une augmentation salée du coût de location des terrains. Il avait d’ailleurs mis sa maison à vendre l’été dernier.
Plainte
C’est une plainte d’un citoyen qui est à l’origine de tout ce branle-bas de combat. La Ville de Granby s’est alors rendue sur place où elle a constaté qu’une cinquantaine de résidents avaient élu domicile sur des lots de roulotte saisonniers, explique le maire de Granby, Richard Goulet.
«Ils n’ont pas de droit acquis. On les avise d’avance que les terrains doivent être libérés. Aucune éviction ne sera faite en hiver. Il faut comprendre que l’on fait ça avec la compagnie et ils sont d’accord avec ce que l’on fait», poursuit le maire Goulet.
Interrogée lundi après-midi, Sandra Pétrin, la gérante régionale du Québec de l’entreprise albertaine Parkbridge Lifetyle Communities, propriétaire du camping Tropicana, avoue avoir été surprise d’apprendre l’éviction des résidents. «Je pensais que c’était seulement les maisons qui n’étaient pas sécuritaires où il y a plein de cochonnerie qui seraient visées», dit-elle avant d’ajouter qu’elle est «100% d’accord» avec la décision.
Que se passera-t-il au 1er septembre pour les récalcitrants? «Je ne veux pas spéculer. La Ville va faire respecter sa règlementation», répond Richard Goulet.
«C’est une situation malheureuse. La Ville ne se sent pas responsable. Je ne sais pas qui a donné l’autorisation de s’installer là», enchaîne le maire. Ce dernier n’a cependant pas l’intention de laisser les citoyens à eux-mêmes. Il précise avoir entrepris des démarches lundi avant-midi auprès d’organismes pour la relocalisation des citoyens. «Je veux voir s’ils peuvent profiter de certains programmes. On va les aider avec les moyens que Granby a», conclut-il.
Selon Sandra Pétrin, Parkbridge Lifetyle Communities n’aidera pas les propriétaires de terrain.