Trois espèces en péril dans l’œil de l’OBVBM

FAUNE.  À l’occasion de la journée mondiale des espèces menacées le 11 mai prochain, l’Organisme de bassin versant de la baie Missisquoi (OBVBM) amorce un projet à trois volets visant le rétablissement de la tortue-molle à épines et la protection des habitats de la tortue des bois et de la salamandre pourpre, trois espèces en péril

Ces activités, en voie de réalisation depuis 2023 à Venise-en-Québec et dans le bassin versant de la rivière aux Brochets, s’échelonneront jusqu’en 2026.

« Le projet a pour objectifs de réduire les menaces qui pèsent sur ces trois espèces en sensibilisant les propriétaires à l’importance des habitats nécessaires à leur survie, en favorisant leur connectivité, et en sensibilisant la population à l’importance de la conservation des milieux naturels pour assurer la protection des espèces menacées », résume Julie Reinling, chargée de projet en concertation, mobilisation et communications à l’OBVBM.

Tortue-molle à épines

Au Québec, la seule population de tortues molles à épines considérée viable se trouve dans les secteurs de la baie Missisquoi, du lac Champlain et de la rivière aux Brochets.

L’OBVBM s’associe au Zoo de Granby, qu’il soutient financièrement pendant trois ans, pour la mise en oeuvre d’un programme visant à maximiser la survie des oeufs de cette espèce essentiellement aquatique.

Ce programme consiste à assurer un suivi au site de ponte, à y collecter des oeufs, à les incuber puis à remettre les juvéniles en liberté.

Depuis 2009, le travail du Zoo de Granby a permis de relâcher 2300 individus. En 2023, 227 oeufs issus de 12 nids ont été collectés. Avec un succès d’éclosion de 92%, ce sont 209 tortues-molles à épines qui ont été mises à l’eau dans la rivière aux Brochets.

En protégeant les oeufs prédateurs et des fluctuations importantes des niveaux d’eau provoquées par les changements climatiques, le programme vise à préserver cette espèce emblématique de la région.

L’OBVBM sensibilise également les plaisanciers de la baie Missisquoi à la vulnérabilité de la tortue-molle à épines à travers un sondage qu’il réalise. En 2023, 1580 plaisanciers ont ainsi été rejoints. Un peu plus de la moitié des sondés connaissaient l’existence de la tortue-molle à épines et la grande majorité des sondés (81%) se sont dit prêts à diminuer leur vitesse de circulation de 10 km/h pour protéger l’espèce.

Tortue des bois

L’OBVBM effectue également des démarches auprès riverains de la rivière aux Brochets dont les terrains ont une haute valeur pour la conservation des habitats de la tortue des bois et de la salamandre pourpre. Cette initiative vise la mise en place d’ententes de conservation volontaire à l’échelle du bassin versant de la rivière aux Brochets. 

La tortue des bois est une espèce semi-aquatique qui vit exclusivement dans le nord-est de l’Amérique du Nord. Des observations réalisées en 2018 ont permis d’estimer à 119 le nombre de groupes de tortues des bois répartis sur l’ensemble du Québec.

« Cette espèce est particulièrement menacée en raison des collisions avec les véhicules, du développement résidentiel, industriel et agricole affectant son habitat, mais aussi en raison de la prédation, de la garde en captivité et du commerce illégal », indique Mme Reinling.

Entre 2007 et 2013, l’OBVBM a procédé à un important travail de caractérisation des milieux riverains de la rivière aux Brochets. Les inventaires réalisés ont permis d’établir la présence de plusieurs espèces à statut précaire, dont la tortue des bois, et ont permis d’élaborer 300 cahiers individualisés fournissant des recommandations aux propriétaires des terrains ciblés par le projet. 

Une caractérisation complète du secteur de la rivière aux Brochets compris entre Stanbridge East et Frelighsburg sera réalisée en 2025-2026 afin de documenter la population de tortues des bois. 

L’OBVBM entend également contacter une trentaine de propriétaires pour leur transmettre des informations sur les saines pratiques de gestion des terres pour la protection de l’habitat cette espèce.

Salamandre pourpre

La salamandre pourpre est la plus grande des salamandres de ruisseau au Québec et se retrouve uniquement dans le sud-est de la province.

En 2021, on rapportait 331 occurrences (peut comprendre de 1 à plus de 100 individus) de salamandre pourpre sur l’ensemble du Québec, mais la taille exacte des populations n’est pas connue.

Les spécialistes estiment que la moitié des populations de salamandre pourpre auraient de bonnes chances de persister dans les 20 prochaines années, si les conditions actuelles sont maintenues ou améliorées

Cette espèce, respirant uniquement par la peau, est particulièrement sensible à toute modification ou détérioration de son habitat. L’apport de sédiments dans les ruisseaux, la modification de l’écoulement naturel de l’eau, la fragmentation de l’habitat et la réduction du couvert forestier sont les principales menaces qui pèsent sur elle.

En 2023, l’OBVBM a confirmé la présence de la salamandre pourpre en ruisseau forestier dans la portion amont de la rivière aux Brochets Nord. Un inventaire faunique et floristique du secteur viendra compléter cette première démarche.

Les propriétaires riverains ciblés recevront eux aussi un document faisant état des caractéristiques de leur propriété et comportant des recommandations pour la protection des espèces observées, dont la salamandre pourpre. 

Ce projet bénéficie du soutien financier de l’OBVBM, du Corridor appalachien, de la Fondation du Zoo de Granby, du Lake Champlain Basin Program, de la MRC de Brome-Missisquoi, du Gouvernement du Canada et de la Fondation de la faune du Québec.