Trump poussera-t-il des migrants vers le Canada?

INTÉGRATION. Parmi les nombreuses déclarations-chocs des derniers jours de la part du président des États-Unis, Donald Trump, il y a cette annonce que son administration allait procéder à des arrestations et expulsions massives de migrants illégaux dans tout le pays. Cela pourrait-il mener à un afflux de ces personnes vers le Canada, notamment vers notre région ? C’est bien difficile à anticiper, selon le directeur de Solidarité ethnique régionale de la Yamaska (SERY), Frey Guevara.

« On n’a aucun contrôle sur le nombre de personnes qui pourraient décider de partir des États-Unis pour venir demander l’asile au Canada, alors c’est difficile de prévoir ce nombre », déclare Frey Guevara, qui dirige l’organisme SERY depuis 2019. Rappelons que SERY offre des services d’accueil et d’intégration aux personnes immigrantes qui s’installent dans les régions de la Haute-Yamaska et de Brome-Missisquoi.

« On verra au fur et à mesure », ajoute M. Guevara, qui croit qu’il est « très possible » que certains immigrants sans papiers aux États-Unis se retrouvent dans la région. Selon lui, une position politique comme celle de Trump peut occasionner une réaction et créer un mouvement parmi les personnes qui ont ce statut chez nos voisins du Sud.

Le DG de SERY affirme que son organisme, qui compte 22 employés, est prêt à travailler pour les personnes qui viendraient trouver refuge ici, si le ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration (MIFI) lui donne un mandat en ce sens, mais il n’y a pas beaucoup de services que SERY peut fournir à cette catégorie d’immigrants.

Le Canada doit accueillir les personnes qui demandent l’asile en arrivant au pays. Il s’agit d’une obligation du droit international en vertu de la Convention de Genève. Les demandeurs d’asile font partie de la catégorie d’immigrants les moins bien servis par les programmes gouvernementaux.

« Une fois que quelqu’un est rendu au Canada avec le statut de demandeur d’asile, il ne s’agit pas d’un immigrant illégal, même si cette personne est entrée au pays de façon irrégulière, à pied par exemple » (comme on le voyait avec le chemin Roxham, il y a quelques années), explique M. Guevara.

Dans la région desservie par SERY, le flux de demandeurs d’asile est relativement constant d’une année à l’autre. Par exemple, en 2024, il s’agissait de 251 personnes.)

Frey Guevara remarque que « ce sont des gens très proactifs pour se trouver un emploi le plus rapidement possible, et ce, même s’ils ne parlent pas encore français ». Il poursuit en disant : « Il ne faut pas oublier que ce sont des êtres humains » qui viennent ici dans le but d’améliorer leur vie et qui ne demandent pas mieux que de contribuer à leur société d’accueil et s’y intégrer.

Les travailleurs étrangers temporaires à la rescousse

Par ailleurs, le directeur général de Solidarité ethnique régionale de la Yamaska constate qu’il y a un grand nombre de travailleurs étrangers temporaires (TET) actifs dans les entreprises surtout manufacturières de la Haute-Yamaska et de Brome-Missisquoi. Ils représentent près de la moitié (48,8 %) des immigrants que SERY a accueillis l’an dernier, soit 653 personnes sur 1339, ce qui en fait la catégorie la plus nombreuse parmi les personnes immigrantes qui reçoivent des services de SERY.

Dans le contexte de pénurie de main-d’œuvre, ils sont venus prêter main-forte aux entreprises d’ici. Ainsi, dans le cas de certaines entreprises à risque de fermer, dans la région de Granby comme ailleurs au Québec, l’arrivée de TET leur a permis de poursuivre leur production, et ainsi de préserver les emplois des travailleurs qui étaient déjà en poste.

« Alors qu’on entend surtout parler du nombre de TET qui arrivent, on ne parle pas assez de l’effet positif qu’ils apportent à l’économie de nos milieux », observe M. Guevara, qui va jusqu’à dire que « c’est grâce à eux que l’économie locale continue de fonctionner ». « Ils ne sont pas venus ici en vacances, mais bien pour travailler ». Il se désole de constater que l’information qui circule au sujet des TET, notamment de la part de certains leaders politiques, n’est « pas exacte ; on laisse la porte ouverte à l’interprétation », voilà pourquoi il juge important de rectifier le tir.

Les travailleurs étrangers temporaires arrivent avec des permis de travail fermés, donc ils sont autorisés à travailler uniquement dans l’entreprise qui les a embauchés. En principe, le contrat est d’une durée de deux ans. Ceux qui sont déjà francophones sont favorisés, alors il y en a beaucoup qui proviennent de Tunisie, ou encore d’Algérie, du Maroc ou du Cameroun.

À noter que les travailleurs étrangers que l’on voit dans les champs l’été n’entrent pas dans la catégorie des travailleurs étrangers temporaires, ils sont plutôt considérés comme des travailleurs agricoles. Ce groupe de personnes immigrantes n’est pas accompagné par SERY, en raison de l’organisation des programmes entre les ministères du gouvernement.