Dépenses militaires: le Canada serait encore plus loin de la cible de 2 % de son PIB

OTTAWA — Un nouveau rapport de l’OTAN laisse croire que si la plupart des autres alliés ont commencé à investir davantage dans la défense, le Canada est encore plus loin d’atteindre l’objectif de dépenses de l’alliance militaire qu’on ne le croyait auparavant.

Le rapport du secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, montre que le Canada prend encore plus de retard sur ses alliés en ce qui a trait à la part du produit intérieur brut national consacrée à la défense.

Les derniers chiffres devraient susciter un nouveau débat sur l’état des dépenses militaires canadiennes, en particulier dans le contexte de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, qui a ébranlé les perceptions de longue date concernant l’ordre et la sécurité dans le monde.

Ils pourraient également ajouter plus de pression sur le gouvernement libéral pour qu’il injecte de nouveaux fonds dans l’armée à un moment où il a promis de nouvelles dépenses considérables dans des programmes sociaux comme un régime universel d’assurance médicaments en échange du soutien du Nouveau Parti démocratique (NPD) au Parlement.

L’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) estimait en juin 2021 que le Canada consacrerait à la défense environ 1,39 % de son produit intérieur brut (PIB) cette année-là. 

Mais dans le rapport publié jeudi, l’OTAN a abaissé ce chiffre: on estime maintenant que le Canada n’a consacré finalement l’an dernier qu’environ 1,36 % de son PIB à la défense.

Le porte-parole du ministère de la Défense, Andrew McKelvey, a attribué la baisse aux changements dans les projections du PIB du Canada.

«La fluctuation de l’estimation de l’OTAN depuis juin 2021 est le résultat de l’évolution des prévisions du PIB, en raison de l’impact économique de la pandémie de COVID-19 et de la reprise économique actuelle», a-t-il soutenu dans un courriel.

«Lorsque le PIB augmente, le pourcentage de ce chiffre représenté par les dépenses de défense est plus faible ⁠— et vice versa.»

Bien que la différence semble minime, elle éloigne encore plus le Canada de l’objectif de 2 % du PIB que tous les membres de l’OTAN ont convenu en 2014 — et qui a été réaffirmé la semaine dernière lors d’une réunion extraordinaire sur l’Ukraine.

La baisse laisse également le Canada fermement à la traîne de l’alliance en termes de dépenses de défense, avec seulement quatre des 29 autres membres de l’OTAN qui auraient dépensé moins en proportion de leur PIB pour la défense l’année dernière : la Belgique, le Luxembourg, la Slovénie et l’Espagne.

Il y avait 10 pays derrière le Canada en 2020, alors que le Canada consacrait 1,44 % de son PIB à la défense.

Interrogée sur le chiffre révisé, la ministre de la Défense Anita Anand a évoqué la promesse du premier ministre Justin Trudeau lors du sommet de l’OTAN de la semaine dernière à Bruxelles que le Canada augmenterait ses dépenses militaires.

Le premier ministre n’a fait à ce moment que de vagues suggestions sur la manière pour le gouvernement d’atteindre l’objectif.

Ses commentaires sont intervenus après que le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a déclaré que les alliés avaient convenu de «redoubler» d’efforts pour atteindre l’objectif de 2% et de soumettre des plans sur la manière de respecter l’engagement lors d’une réunion en juin à Madrid, en Espagne.

«Nous continuerons d’augmenter les dépenses de défense, a déclaré Mme Anand jeudi. Et nous sommes actuellement engagés dans un processus budgétaire. Et ce processus doit suivre son cours. Et comme nous le savons, il y aura un budget le 7 avril.»

La ministre de la Défense a ajouté qu’elle travaillait sur un plan «robuste» pour moderniser le Commandement de la défense aérospatiale de l’Amérique du Nord (NORAD), le réseau conjoint américano-canadien qui sert de colonne vertébrale à la défense de l’Amérique du Nord contre les attaques.

Consacrer de l’argent à la modernisation du NORAD, qui comprend le remplacement d’une série d’installations radar des années 1980 dans le Grand Nord canadien, serait l’un des moyens les plus simples pour le gouvernement d’injecter plus de fonds dans l’armée.

Le projet est prioritaire, notamment dans le contexte de tensions avec la Russie, et ne figurait pas dans la politique de défense des libéraux en 2017.

Mais des experts affirment que le Canada devrait ajouter 16 milliards $ par an à son budget de défense de 30 milliards $ pour arriver au seuil de 2%, un niveau impossible à atteindre à court terme et nécessitant une refonte importante de sa politique de défense.