Ingénieurs de l’État: l’APIGQ allègue le recours à des scabs et s’adresse au tribunal

MONTRÉAL — Les ingénieurs de l’État sortent l’artillerie lourde. Leur syndicat vient de déposer des plaintes au tribunal contre Québec pour négociation de mauvaise foi, entrave aux activités syndicales et même recours à des briseurs de grève.

Et il a également demandé au ministère du Travail de dépêcher des enquêteurs pour vérifier la présence de briseurs de grève concernant certains chantiers.

L’Association professionnelle des ingénieurs du gouvernement du Québec (APIGQ), qui représente 1800 ingénieurs, a débuté sa deuxième grève le 1er juin. Elle avait débrayé une première fois à compter du 22 avril, puis avait repris les négociations avec le Conseil du trésor, avant que celles-ci achoppent une nouvelle fois le 31 mai.

Pourtant, tant l’APIGQ que la présidente du Conseil du trésor, Sonia LeBel, s’étaient dits près d’une entente de principe. La ministre avait invité le syndicat à poursuivre les discussions plutôt que de relancer sa grève.

Maintenant, le conflit prend une autre tournure, avec des plaintes de l’APIGQ devant le Tribunal administratif du travail.

Les plaintes

Entre autres, l’APIGQ allègue que le ministère des Transports a parfois eu recours à des briseurs de grève, notamment en faisant appel à un technicien pour compléter le travail amorcé par un ingénieur.

Le président de l’APIGQ, Marc-André Martin, soutient par exemple qu’un ingénieur avait débuté des devis techniques avant la grève. Lorsque celle-ci a été déclenchée, un gestionnaire aurait pris le document non complété et aurait demandé à un technicien de compléter les devis. Le même cadre aurait ensuite signé le document avant de le transmettre pour l’appel d’offres

La cause n’a pas encore été entendue; la preuve devra être faite devant le tribunal.

Dans un autre cas allégué par l’APIGQ, un gestionnaire aurait demandé à un technicien d’analyser les demandes d’avenants et d’extras formulées par un entrepreneur.

«On se serait attendu à ça peut-être d’une compagnie privée d’une autre époque. C’est extrêmement troublant de la part d’un gouvernement», a commenté M. Martin en entrevue.

Le syndicat allègue aussi une négociation de mauvaise foi et une entrave à ses activités, en lien avec le fait que l’employeur a déterminé sa politique de télétravail et a aussi arrêté un aménagement du bureau, sans place attitrée à chacun, sans en négocier les paramètres avec lui, et ce, alors que les parties étaient en pleine négociation de la convention collective.

M. Martin déplore aussi le fait que lorsque les parties étaient près d’une entente de principe, le 31 mai, Québec a exigé en retour que le syndicat se désiste des recours qu’il avait déjà entamés au sujet du télétravail et de l’aménagement dépersonnalisé du bureau.

Selon lui, Québec savait qu’en exigeant que le syndicat se désiste de ses recours, toute entente de principe tomberait à l’eau — d’où sa plainte de négociation de mauvaise foi.

Dans ses requêtes, l’APIGQ se garde aussi le droit de demander des dommages-intérêts à Québec si elle gagne sa cause, de même qu’un certain montant pour les honoraires et frais encourus.

Joint par courriel, le cabinet de la ministre LeBel n’a pas souhaité commenter le dépôt des plaintes ni leur contenu.