La Californie inondée poussera le prix des laitues, possiblement jusqu’à l’été

Les prix de la laitue devraient augmenter le mois prochain et pourraient rester élevés pendant l’été, selon des observateurs agricoles, notamment à cause des inondations dans une zone agricole clé de la Californie.

La vallée de Salinas, où une grande quantité de laitue et d’autres produits consommés en Amérique du Nord sont cultivés chaque année, a connu de fortes pluies et des tempêtes depuis le début de l’année, de signaler John Bishop, acheteur national pour le distributeur de produits frais Fresh Start Foods. Toute cette eau supplémentaire a inondé les champs et retardé les semis, causant des centaines de milliers de dollars de dommages aux cultures.

Des dizaines de milliers d’acres de terres agricoles ont été inondées à Salinas depuis le début de l’année, selon Mark Shaw, vice-président des opérations de Markon Cooperative, basée en Californie. Des températures inférieures à la moyenne aggravent les difficultés des agriculteurs, a-t-il expliqué dans un courriel.

Salinas est la même région où la maladie a frappé les cultures de laitue l’automne dernier, créant de graves pénuries et des prix constamment élevés des laitues iceberg et romaine qui ont été remarqués par les consommateurs canadiens dans les épiceries. 

Chaque mois de novembre, la production de laitue et de certains autres légumes se déplace vers des zones désertiques plus chaudes, notamment à Yuma, en Arizona, ou ailleurs en Californie. La deuxième semaine d’avril est celle où la majorité de la production retourne à Salinas, mais ce printemps, la région ne sera pas prête.

« Nous nous préparons à un marché où la demande dépassera l’offre, ce qui fera grimper les prix comme nous l’avons connu en octobre, novembre et décembre derniers », d’après Mark Shaw, qui prévoit quatre à six semaines d’approvisionnement limité.

Mais M. Bishop prévoit quant à lui qu’un écart important pourrait durer jusqu’en juillet.

Ron Lemaire, président de l’Association canadienne de la commercialisation des fruits et légumes, signale que l’industrie agricole a l’habitude de faire preuve de créativité pour faire face aux intempéries. À l’heure actuelle, les agriculteurs californiens déploient tous les outils dont ils disposent pour atténuer les effets de la pluie, selon lui, mais il prévoit qu’il y aura moins de production dans les mois à venir, ce qui fait généralement grimper les prix.

La météo est le principal facteur affectant les prix des produits, suivi des coûts de transport, selon Rich Donsky, copropriétaire du distributeur ontarien Mister Produce. Il n’est donc pas surprenant que l’industrie agricole investisse davantage dans l’agriculture à environnement contrôlé, comme les serres et les fermes verticales.

Par exemple, la société mère de Fresh Start, Gordon Food Service, s’est associée à la société d’agriculture intérieure Square Roots, construisant des fermes intérieures dans des endroits à travers les États-Unis, y compris dans des centres de distribution. «Nous croyons que c’est l’avenir de l’agriculture et de notre approvisionnement alimentaire», d’ajouter John Bishop.

L’industrie a également récemment constaté un plus grand intérêt pour la production toute l’année au Canada, car le changement climatique rend les problèmes tels que les conditions météorologiques extrêmes et la sécheresse plus répandus, selon Sylvain Charlebois, professeur à l’Université Dalhousie, en Nouvelle-Écosse, et directeur du laboratoire d’analyse agroalimentaire de l’institution.

John Bishop s’attend à ce que la poussée pour cultiver plus de produits au Canada se poursuive. « D’où nous obtenons notre nourriture et comment elle nous parvient, tout cela contribue au coût de ce que nous achetons. Il est donc logique de trouver des moyens de produire des produits sur une base locale », selon lui.

L’industrie des serres ne remplacera jamais la culture en plein air, d’après Ron Lemaire, mais il pense qu’elle peut combler les lacunes de la chaîne d’approvisionnement. « Ça fait partie de la solution, mais ce n’est pas la solution complète ».

De grandes entreprises alimentaires investissent dans des produits cultivés au Canada. Sylvain Charlebois signale que McCain a consacré des millions de dollars à l’entreprise agricole verticale GoodLeaf Farms et que le géant californien des baies Driscoll’s s’est récemment associé à des agriculteurs canadiens pour cultiver des baies au nord de la frontière.

Et en 2020, la chaîne de restauration rapide Wendy’s a annoncé qu’elle utiliserait dorénavant de la laitue cultivée en serre en Alberta dans toutes ses salades et ses sandwichs.

L’agriculture verticale a reçu beaucoup d’attention et de capitaux au cours des dernières années, mais selon Ron Lemaire, le modèle commercial doit être développé davantage. Sylvain Charlebois s’attend à ce que l’investissement dans les produits locaux se poursuive dans les années à venir.

« Je pense qu’il y a une prise de conscience (…) de notre vulnérabilité, surtout en ce qui concerne les fruits et les légumes. Et pas seulement pendant les mois d’hiver, mais toute l’année».