Tribunal: la municipalité de Sayabec a entravé les activités du syndicat des employés
MONTRÉAL — La municipalité de Sayabec, qui était allée jusqu’à réclamer par une résolution du conseil municipal le retrait de la conseillère du syndicat représentant les employés de la ville, est blâmée par le Tribunal administratif du travail.
Le Tribunal a statué que la municipalité avait non seulement discrédité le syndicat des employés — une section locale du Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), affilié à la FTQ — mais qu’elle avait aussi tenté de choisir elle-même son interlocuteur syndical.
La juge administrative Myriam Bédard conclut que la municipalité de Sayabec a entravé les activités du syndicat et lui ordonne de cesser de s’ingérer et d’entraver ses activités.
Elle n’a toutefois pas accepté d’octroyer le versement de dommages punitifs, comme le réclamait le SCFP. Mais elle a ordonné à la municipalité de transmettre la décision du tribunal par courriel à tous ses salariés et de l’afficher sur son site internet.
La trame de fond en est une de mauvaises relations au sein de la municipalité, avec plusieurs plaintes de part et d’autre d’insubordination, des mesures disciplinaires contestées par griefs, puis des allégations de harcèlement.
Lors d’une rencontre patronale-syndicale au sujet de trois griefs, le maire avait demandé à la conseillère syndicale si un grief serait déposé à chaque fois qu’il y a une mesure disciplinaire contre un employé. La municipalité de 1800 habitants appréhendait les frais engendrés par les procédures de grief et d’arbitrage.
La municipalité avait ensuite convoqué une rencontre avec les salariés. «Les élus tentent de convaincre que cet onéreux processus, s’il est utilisé à mauvais escient, ne peut que nuire à tous. Certains salariés allèguent plutôt qu’on a tenté de les dissuader de poursuivre les griefs», rapporte le Tribunal.
Le syndicat avait ensuite publié un communiqué de presse, dans lequel il déplorait «le climat malsain de travail qui règne» dans la municipalité depuis plusieurs mois. Il y demandait «à l’employeur d’agir directement auprès de la personne en position d’autorité en imposant des sanctions disciplinaires».
Les médias locaux s’étaient emparés de l’affaire.
Lors d’une assemblée très courue, à laquelle 300 personnes avaient assisté virtuellement ou en personne, les conseillers municipaux avaient réclamé le retrait de la conseillère syndicale — qu’ils nommaient dans la résolution.
La juge administrative Bédard déplore cette façon de faire. «Dans le présent dossier, les membres du conseil sont intervenus durement et publiquement contre les employés et la conseillère syndicale.»
«Bien que les propos et agissements du syndicat et de sa conseillère se révèlent durs, voire inappropriés, à certains égards, ils ne justifient pas le conseil municipal de contrevenir à la loi en tentant de choisir son vis-à-vis syndical», ajoute-t-elle.
«Dans la présente affaire, non seulement la municipalité discrédite le syndicat, mais elle tente de choisir son interlocuteur syndical. Il s’agit sans équivoque d’entrave au sens du Code du travail», conclut le Tribunal.