Festival de théâtre amateur de Massey-Vanier: des élèves résilients rendent le projet possible

SPECTACLE. Alors que l’édition de l’an dernier avait dû être annulée à la dernière minute en raison de la pandémie, le Festival de théâtre amateur de l’école secondaire Massey-Vanier aura bel et bien lieu cette année. Cette année à tout le moins particulière aura causé bien des embûches aux élèves d’art dramatique, qui, malgré tout, continuent de porter le projet à bout de bras.

Malgré les problèmes de motivation, les incertitudes, la pandémie qui fait toujours rage, les mesures limitant leur nombre de jours en classe, les élèves n’ont pas arrêté de persévérer pour que cette édition se tienne, soutient l’enseignant du programme, Éric Jacques.

«Le gros obstacle, c’était vraiment l’idée d’y croire, a-t-il déclaré. Quand tu y crois, tu avances, mais quand tu as un doute que tout peut s’effondrer, l’incertitude est majeure. Elle est autour de nous, mais aussi à l’intérieur de plein d’élèves qui se demandent si ça va valoir la peine, si ça va avoir lieu. Il peut y avoir un effet domino dévastateur.»

Rester motivés alors que tout pourrait tomber en quelques jours n’est pas une mince tâche.

«La lourdeur de ce qui arrive, avec la COVID-19, le nombre de cas qui monte, c’est difficile sur le moral, a affirmé un élève de 5e secondaire, Mathieu Bélanger. On n’a pas toujours le goût de pratiquer pendant nos congés, de prendre un peu plus de temps, mais on le fait quand même par passion.»

«Depuis le début, je n’avais pas trop de motivation à écrire, a admis une autre élève de 5e secondaire, Marie-Ève Picotin. À cause la pandémie, un jour sur deux à l’école, on ne savait pas trop ce qui allait se passer. On ne sait pas non plus si les élèves voulaient le faire aussi.»

«Je pensais que la motivation était pour arriver plus tard, a-t-elle continué. On a commencé par sept pages, puis ensuite 15 et après une vingtaine. Personnellement, je n’ai pas vraiment eu de motivations, mais les idées venaient toutes seules. Ça a été vraiment facile d’écrire pour ma part. Je m’inspirais de mon entourage, des gens dans ma classe que je connais un peu. La motivation manquait un peu, mais je n’ai pas lâché.»

Les défis ne se sont pas arrêtés après l’écriture.

«Rendu à la distribution des textes, ça a commencé à faire un peu plus peur, a ajouté Marie-Ève. On ne sait pas comment les autres élèves vont réagir, s’ils vont travailler et s’ils vont être motivés eux-mêmes. À l’école, c’est plus simple, mais à la maison, c’était difficile parce qu’il y a beaucoup de distractions.»

Contraintes

Si la motivation n’a pas toujours été facile à trouver pour certains, d’autres contraintes reliées à la pandémie ont également eu leur impact sur la préparation en vue du festival.

«Ce qui est difficile aussi, c’est de respecter les bulles-classes, a indiqué une élève de 4e secondaire, Noémie Chenier. Ça a été quelque chose de difficile pour ma pièce. Il fallait trouver des gens et exactement qui tu veux pour les personnages. Montrer ses émotions, c’est beaucoup plus difficile avec le masque aussi.»

«Ce qui est assez difficile, c’est surtout les masques et la distance à respecter, a fait remarquer Mathieu. C’est un facteur qui est nouveau dans le fait de préparer une pièce, dans les pratiques. La motivation de jouer avec un masque et à deux mètres n’est pas la même. Souvent, on va vouloir jouer avec du contact pour créer des scènes.»

Noémie et Mathieu sont deux élèves «hors cours», c’est-à-dire qu’ils ne sont pas dans l’option art dramatique cette année. Si ça peut paraître un obstacle majeur, ça a semblé être un élément encore plus motivateur pour Noémie.

«Ce qui m’a donné beaucoup le goût d’écrire, c’est le fait de ne pas pouvoir avoir mon option, ce qui était pour moi, une thérapie, a-t-elle déclaré. C’était quelque chose qui me calmait, qui me permettait d’être quelqu’un d’autre quand je jouais et un peu, me sauver de mes problèmes. Écrire m’a aidé à penser à autre chose.»

An passé

L’annulation du festival l’an dernier a porté un coup dur aux élèves qui sont aujourd’hui en 5e secondaire, eux qui devaient théoriquement y participer en 2020.

«La gang qui est en 5e secondaire cette année a vécu la fin abrupte du festival de l’année passée, a relaté Éric Jacques. C’est clair que cette année, niveau motivation, il y avait des craintes, des hésitations. Il y a des élèves qui ont hésité à embarquer dans le bateau. Même moi, je me suis questionné. Surtout quand les élèves sont tombés en ligne ou un jour sur deux à la maison, ça a commencé à être difficile.»

«Marie-Ève et Mathieu étaient dans le même show l’an passé, a-t-il poursuivi. C’est l’équipe qui s’est fait faucher la première. Le 13 mars, ils avaient leur générale et l’école a été fermée le jeudi soir, le 12. Ça avait été toute une saga. On avait appris qu’on pouvait jouer devant 250 personnes, on s’est lancés dans la générale, le midi, on a eu d’autres infos, ça tombait à 50, ensuite, des parents nous ont écrit pour nous dire qu’ils n’enverraient pas leurs enfants à l’école. Et soudainement, c’est tombé alors qu’ils montaient sur scène pour leur générale.»

D’ailleurs, si le spectre de l’annulation du festival cette année était présent, le fait d’avoir raté sa chance l’an dernier a été un élément motivateur pour Mathieu.

«Les sources de motivation sont différentes pour tout le monde, a-t-il expliqué. Pour moi, ma source de motivation a surtout été que je n’ai pas eu la chance de participer l’année dernière. Je veux me rattraper, faire ce que je n’ai pas pu faire et donner tout ce que j’ai pour ma dernière année du secondaire. Je veux finir ça en beauté. Le goût de la scène, lui-même, est une bonne motivation.»

Ces élèves ont d’ailleurs passé une partie de leur secondaire à se préparer en vue du festival.

«Ça a toujours un objectif de se préparer mentalement pour arriver au festival un jour, a indiqué Mathieu. Même quand on était plus jeunes, au début du secondaire, on avait toujours des petits rôles par-ci par-là. C’est intéressant parce que c’est un projet de groupe, avec les autres élèves et les professeurs. Tout le monde a le goût de créer.»

«En théorie, je n’étais pas censée être en art dramatique quand je suis arrivée au secondaire, a raconté de son côté Noémie. Puis, à l’année du 50e, c’était possiblement l’année la plus grosse du festival et on dirait que ça a déclenché quelque chose en moi. Depuis ce temps-là, je suis toujours revenue. Cette année, j’ai été placée en art plastique et c’est une des pires déceptions que j’ai vécues.»

Travail acharné

Pour pouvoir arriver à présenter le festival, les élèves ont dû donner les bouchées doubles.

«Il y a des semaines, nos horaires sont remplis! a affirmé Noémie. Tous les trous que je peux trouver, je les prends, on répète, on ne perd pas notre temps!»

«Dès qu’on a la pause, on parle de textes, a ajouté Mathieu. Le midi, c’est encore les textes, on révise le par cœur. Même après l’école, on continue par vidéoconférence.»

«Je trouve ça très beau de voir les élèves qui se réunissent les soirs, les fins de semaine, pendant Pâques pour répéter.»

Le festival devrait se tenir du 17 au 22 mai. Les spectacles seront diffusés en direct via YouTube.

«C’est sûr que c’est moins trippant de le diffuser en ligne que devant public, avec les applaudissements, a indiqué Éric Jacques. On l’a vécu avec des spectacles de 1re et de 2e secondaires. Ça a été plaisant, il y a beaucoup de gens qui l’ont regardé, mais dans la salle, il y avait un grand silence. Il n’y avait pas les rires qui nous supportent. Tout ça, ça joue dans la tête des élèves.»