Le Guide alimentaire canadien pourrait être moins approprié pour les aînés

MONTRÉAL — Les aînés de 65 ans et plus qui respectent les recommandations du nouveau Guide alimentaire canadien pourraient ne pas obtenir suffisamment de certains nutriments importants, prévient une nouvelle étude publiée par des chercheurs de l’Université McGill.

Leur alimentation pourrait ainsi ne pas contenir assez de folates, de vitamine D et de calcium.

«On s’imagine que Santé Canada va émettre des lignes directrices pour la population qui vont faire en sorte d’avoir une alimentation la plus complète possible, qui va subvenir à nos besoins sans avoir recours à des suppléments. C’est ça le but des lignes directrices nutritionnelles. Et puis là, on se rend compte que ce n’est pas tout à fait le cas avec les personnes âgées», a dit l’auteure de l’étude, la professeure Stéphanie Chevalier.

La vitamine D et le calcium jouent un rôle important dans la santé des os. Et comme la vitamine D est aussi impliquée dans la santé des muscles, on saisit rapidement l’importance de ces deux nutriments dans l’alimentation des aînés.

L’acide folique (ou les folates), quant à lui, est impliqué dans la fabrication des globules rouges (qui transportent l’oxygène dans le sang) et dans la formation de l’hémoglobine.

Il y a plusieurs aspects positifs au nouveau Guide alimentaire canadien dévoilé en 2019, a dit Mme Chevalier, mais le fait qu’il s’applique à toute la population âgée de deux ans et plus l’«a inquiétée un peu».

«Ça inclut les enfants, les adolescents, les femmes enceintes, les personnes âgées qui sont des populations qu’on connaît depuis toujours, qui ont des besoins en nutriments particuliers, a-t-elle dit. Je me suis demandé: est-ce qu’on est en train de passer à côté de quelque chose parce qu’on évite de faire des recommandations, disons plus précises, pour ces groupes de la population?»

Son étudiant postdoctoral Didier Brassard et elle ont donc passé au peigne fin les habitudes alimentaires réelles de centaines d’aînés pour mesurer leur niveau d’adhésion au Guide alimentaire canadien.

Ils ont constaté que cette adhésion peut se traduire par une augmentation ou une diminution de l’apport en certains nutriments, ou encore ne faire aucune différence.

Le problème, a dit Mme Chevalier, est qu’il est déjà souvent difficile pour les aînés de consommer suffisamment de nutriments comme le calcium ou la vitamine D.

«Et le fait d’adhérer encore plus au Guide alimentaire canadien ne les aide pas, a-t-elle ajouté. Nous avons été très surpris.»

Mais les nouvelles ne sont pas que mauvaises. Les auteurs de l’étude ont constaté que les aînés qui respectent le Guide alimentaire canadien sont moins susceptibles que les autres de ne pas consommer suffisamment de magnésium, de vitamine B6 et de protéines.

Les personnes âgées devraient néanmoins garder en tête qu’elles ont besoin d’un peu plus de protéines que ce qui est recommandé par le Guide, a dit Mme Chevalier, et elles devraient tenter d’en consommer à chaque repas, que ces protéines soient d’origine animale ou végétale.

Santé Canada a mis en ligne, au cours des dernières années, des ressources supplémentaires, comme des lignes directrices pour les aînés. L’information n’est toutefois pas nécessairement facile à trouver et elle s’adresse souvent à des professionnels de la santé ou encore à des directeurs d’établissement ― et ce, même si les aînés sont nombreux à se renseigner sur le web.

Les aînés n’ont pas toujours le contrôle qu’ils souhaiteraient sur leur alimentation. Ceux qui vivent en résidence doivent souvent accepter le menu proposé. Ceux qui vivent à la maison, s’ils souffrent de solitude ou s’ils sont en perte d’autonomie, pourront avoir une capacité limitée à se procurer les aliments qu’ils désirent.

Le vieillissement s’accompagne aussi souvent d’un déclin de l’appétit.

«Puisqu’on parle de calcium et de vitamine D, je recommanderais des produits laitiers, a dit Mme Chevalier. Je pense entre autres au yogourt grec. C’est un aliment que je recommande souvent aux personnes âgées qui ont un plus petit appétit. Il y a beaucoup de calcium dans un petit pot de yogourt grec, et c’est aussi une bonne source de protéines.»

Les folates se retrouvent dans les légumes verts et les carences en vitamine D peuvent être comblées par un supplément prescrit par un médecin.

Les chercheurs examineront maintenant comment le respect des lignes directrices actuelles affecte les résultats en matière de santé, tels que la fonction physique, la mobilité et la cognition, et comment les lignes directrices peuvent être modifiées pour améliorer ces résultats.

Les conclusions de cette étude ont été publiées par le Journal of Nutrition.